Écrit par Charline Fauveau
Création Sonore Laurent Sellier
Voix Marianne Schlégel
Chères soeurs du RAM*,
La mère en moi s’est exaltée à la lecture de “L’allaitement artificiel et le biberon” publié en 1877. J’ai rencontré quelques huit-cents femmes dans les premiers jours de leur maternité sans qu’aucune ne mentionne Madeleine Brès et l’ingénieuse tétine décrite ci-après, ce qui m’incite à vous écrire.
Brès constate que l’allaitement artificiel est la première cause de mortalité infantile et qu’il est pourtant devenu une nécessité sociale. Dès lors, elle consacre ses recherches à identifier les conditions dans lesquelles le biberon peut être pratiqué sans danger. Elle aborde ainsi les critères permettant de bien choisir le lait, l’hygiène indispensable à appliquer au biberon, mais aussi la température à laquelle il doit être donné. Puis, elle traite de la tétine idéale. Celle-ci doit reproduire les principales caractéristiques du sein maternel quant à sa forme et son débit, mais également en ce point : le lait doit sortir au travers de petits trous finement percés, tel un dé à coudre, et non en un jet par une fente. En voici la raison : de fines gouttelettes se mélangent mieux à la salive qu’une grosse goutte. Cela favorise la digestion délicate du nourrisson et prévient efficacement les coliques. Semblables aux pommes de nos arrosoirs, connaissez-vous pareilles tétines pour nos biberons ?
D’avance, merci pour vos témoignages.
N.B. : Madeleine Brès, née Gebelin (1842-1921) a marché d’un pas ferme et pragmatique dans une voie réputée inaccessible aux femmes. Grâce à sa thèse De la mamelle et de l’allaitement qui a reçu la mention “extrêmement bien”, elle a été la première Française, en 1875, à devenir Doctoresse en médecine. Elle a consacré sa vie à l’approfondissement et à la transmission de ses connaissances. Pour ce faire, elle a fondé sa propre crèche, gratuite. Elle a sensibilisé les directrices des écoles maternelles, des crèches, des garderies ; elle a animé des causeries et des conférences et a, en outre, dirigé le journal Hygiène de la femme et de l’enfant. Tout cela en étant elle-même mère de trois enfants.
Grâce à Brès, l’espérance de vie à la naissance a augmenté. Malgré ses innombrables bienfaits et la notoriété acquise auprès des hommes de science et de sa riche clientèle, elle est décédée dans la pauvreté, à l’âge de 79 ans.
Au regard de l’Histoire des femmes dans la médecine, elle a mis fin à une nuit d’interdiction de cinq siècles et a conduit, par son exemple, les autres femmes à la suivre.
Madeleine est à la République naissante ce que fut Hildegarde à l’Europe Médiévale, Agnodice à la Grèce Antique et Pesehet à l’Égypte ancienne : un symbole, dont l’évocation réveille la médecine qui sommeille naturellement en chaque femme.
*RAM : Relais d’Assistant.es Maternel.les